Le monde de Shawei

Il y a plus de 10 ans, je crois que c'était en 1993 ou 1994, j'étais allé voir le film de Cyril Collard devenu film culte d'une génération après la disparition soudaine du réalisateur. Celui-ci y racontait l'histoire de la débauche d'un séropositif, avant d'être emporté par la maladie et sans connaitre le succès de son film qui surviendra après sa mort. On se souvient tous des larmes de Romane Bohringer à la remise des Césars en l'absence de celui qui avait fait démarrer sa carrière. Déjà à l'époque, je m'étais mefié de l'effet "événement" pour juger de ce film et avait attendu qu'il soit rediffusé dans un cinéma de quartier nantais pour avoir un regard plus objectif. J'avais 20 ans ou presque, faisais partie de la génération qui avait grandi dans la peur du SIDA et ce film m'avait bien entendu ému par la force de vie qu'il contenait. Je m'étais dit alors qu'il faudrait le revoir dans 10 ans pour savoir s'il s'agissait vraiment d'un bon film. Voila chose faite il y a quelques jours. Je ne pensais pas alors que je le reverrais en Chine.   

L'émotion reste intacte. Le film ne nous laisse pas respirer. Il défile à toute vitesse à l'image de la courte vie de son realisateur. Le SIDA est toujours là. La Chine vit depuis quelques années ce que la France a vécu au début des années 90 : la découverte de la maladie, des scandales du sang contaminé de la réalité de l'homosexualité "Les nuits fauves", diffuse largement en DVD pirate a deja gagné un public, celui d'une jeunesse faisant tomber bien des barrières morales de la societé traditionnelle chinoise. J'ai souvent pensé que l'on vivait en Chine dans les années 2000, la libération des moeurs que la France a connu en 1968.

Le film de Cyril Collard nous apprend une chose : essayons de comprendre avant de juger le comportement d'autrui. Nul n'a le monopole de la vérité et chacun en détient une part, ne serait-ce qu'en montrant l'exemple à ne pas suivre... Et nul n'est à l'abri de devenir dans certaines circonstances un mauvais exemple...  

Comme disait Léo Ferré :  " Ce qu'il y a de gênant dans la morale, c'est que c'est toujours celle des autres ! "